Remontée dans le territoire

L’organisation

7:57 min. - C’était dans l’enthousiasme qu’on voyait revenir le mois d’août, la période de l’année où on retournait dans le bois. Chez les Bellefleur de Unaman-shipu (La Romaine), on comptait une dizaine de canots et cinq ou six tentes. Il fallait se rendre à un endroit qu’on appelait « Ushakamesh » (là où il y a beaucoup de poissons).

Transcription

Zacharie Bellefleur - C'était dans l'enthousiasme qu'on voyait revenir le mois d'août, la période de l'année où on retournait dans le bois. Chez les Bellefleur de Unaman-shipu (La Romaine), on comptait une dizaine de canots et cinq ou six tentes. Le trappage commençait le 3 novembre. Donc, il fallait se rendre avant cette date à un endroit qu'on appelait « Ushakamesh » (là où il y a beaucoup de poissons). Pas très loin du départ, à l'embouchure de la rivière, nous campions pour la première fois. C'est qu'on y trouvait une abondance de graines rouges et le capitaine le savait. Chez nous, dans le clan Bellefleur, c'était le grand-père Penashue qui était le capitaine. Après le trappage, nous commencions à redescendre vers le village, étape par étape, selon les caches (« tshesheshipitakan ») où nous avions laissé des provisions. À la fonte des neiges, nous étions rendus au village.
Narration - Zacharie Bellefleur se souvient d'un voyage avec sa famille alors qu'il était encore enfant, un voyage dans le territoire traditionnel, en direction de Tshishe-shastshit. À mi-chemin de l'expédition, dans un portage quelque part entre Unaman-shipu et Tshishe-shastshit, les Bellefleur trouvèrent une lettre sur un arbre. Cette lettre recommandait aux voyageurs de s'en retourner d'où ils venaient puisqu'une épidémie de rougeole frappait Tshishe-shastshit. Penashue Bellefleur et son clan durent faire volte-face et repartir vers Unaman-shipu. Si un décès survenait dans le territoire traditionnel à la suite d'un accident ou d'une mort subite, on enfermait la dépouille dans un coffrage de bois que l'on plaçait sur une île. Au retour, en redescendant vers la côte, la famille récupérait le corps pour l'amener au village.
Louis Basile - Mon grand-père vivait en forêt à l'année longue, il partait à l'automne et restait même l'été. Plutôt que de gagner la côte en juillet, il s'en allait vers Mushuat, la toundra, là où il n'y a ni mouche, ni arbre, mais du vent. Lorsque nous partions en portage vers la rivière Saint-Jean, nous la descendions jusqu'à la rivière Romaine. Ensuite le lac Brûlé, puis Atikunuk, toujours en direction de Goose Bay. Autrefois, ces portages étaient larges. Maintenant ils sont bouchés. Dans ces voyages, nous amenions un peu de nourriture, de la farine, du thé, de la graisse, etc., et un peu de tabac. Quand il ne nous restait presque plus rien, c'était le signal pour arrêter et nous mettre à chasser pour notre nourriture. Après, nous placions nos premiers pièges à fourrure. Plusieurs familles campaient ici et là, dans différents endroits, et ne se voyaient qu'aux trois ou quatre mois. C'était l'aîné qui décidait de tout, incluant l'endroit où nous irions camper l'automne. Ils se parlaient entre aînés et, nous autres, nous suivions. Si je vais en forêt pour une période de deux à trois mois, je sens que je dois me servir des enseignements de mon grand-père. Et c'est ce que je fais.
En forêt, il est important de posséder ce savoir traditionnel. Par exemple, le fait que tu marches t'oblige à te fabriquer des raquettes. Et pour tes raquettes, il te faut des lanières. Alors, tu devras tuer un caribou si tu veux te procurer tout l'équipement dont tu auras besoin durant l'hiver. Ce sera pareil pour la nourriture. Est-ce que la nourriture que tu as amenée sera suffisante pour la durée de ton séjour ? Si tu n'en as pas emportée assez, tu n'auras d'autre choix que d'attraper un caribou. Le grand-père de mon grand-père racontait que c'est le grand-père qui transmettait son savoir à son petit-fils.
Shimun Basile - On s'en va par là, rame de l'autre côté.
Il faut passer par là.
Musique - Rodrigue Fontaine, Bill St-Onge, Luc Bacon


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kapatauat
ils font du portage
kassekau
chute
matapeshtau
il finit son portage
minishtiku
île
nakatshun
au pied (au bas) des rapides
natai-kukushu
remonter le courant à la perche
nishtamitikutsheu
il rame en avant
pakauat
ils débarquent du canot
piutamu
il descend les rapides en canot
takuaitsheu
elle dirige le canot
uashtessiu
les arbres changent de couleur
uauakashkuaimuat
ils rament dans un cours d'eau sinueux
uishitshiminana
des airelles d'Ida
uiushuat
ils transportent des bagages sur leur dos
ushkuepakau
forêt de bouleaux



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