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Grand-mère

Evelyne à Montréal

4:52 min. - Peu de temps après l’époque des pensionnats, Evelyne s’en va étudier à Montréal.

Transcription

Evelyne St-Onge - Ma sœur qui demeurait à Montréal m’a demandé pour aller garder son garçon et j’y suis allée. Un moment donné, elle me dit « Pourquoi tu n’appliquerais pas à tel endroit ou encore à tel autre endroit? » On a fait le tour et on est allées là où elle avait fait son cours. Elle aussi était infirmière auxiliaire. C’était à Buckingham et j’ai été acceptée aussitôt. Je suis retournée dans ma communauté, à Schefferville après un an d’étude exactement. Je m’étais ennuyée de la langue innue et je ne le savais pas. Je ne parlais pas, je faisais juste écouter, c’était comme une chanson. Je termine mon cours et là je cherche quelqu’un pour m’accompagner à ma graduation et mon frère me présente Gilles. J’ai alors trouvé un accompagnateur pour ma graduation et un mari par la même occasion. On a eu deux enfants, Benoît et Michèle. J’aimais beaucoup l’esprit d’aventure de Gilles. On pouvait partir n’importe quand et moi avec mon esprit nomade, j’étais toujours prête à partir. On s’est rendus jusqu’en Californie et même à Cuba. Les Indiens étaient très aimés et très exotiques à cette époque-là. Je trouvais ça difficile de vivre avec 2 enfants à Montréal et je commençais à être stressée. On a alors décidé d’aller vivre à Schefferville. À Schefferville, j’ai trouvé ça assez dur, assez difficile les premiers temps. C’est parce que j’ai été témoin de plusieurs scènes de racisme. Avec Gilles, on a commencé à se laisser tranquillement. J’avais 30 ans et deux enfants. Un soir de Noël, une de nos amies nous avait invités. Un moment donné, elle brassait les cadeaux et disait « j’espère que c’est ce que j’ai demandé ». Elle voulait une chaîne, mon amie avait une chaîne dans le cou, une dans le bras et une autre dans le jarret. Je me demandais où elle allait mettre sa nouvelle chaîne et là, il y a eu comme un déclic dans ma tête. Je me suis demandée si je voulais être enchaînée comme elle. Est-ce que je vais vivre en français ou vivre en innu… et là il y a eu un grand questionnement qui n’arrêtait pas. Qui suis-je, est-ce que je suis une Innue ou une Québécoise. Si je suis une Québécoise, il faut que j’accepte de vivre comme eux, alors il faut que je change de valeurs. Et si je suis Innue alors là je ne connais rien à ma culture. On s’est laissés Gilles et moi et je suis retournée chez les Innus. Les Innus m’ont dit « Depuis que tu es ici, ça va assez mal. » Faut dire que je passais mon temps à dénoncer. À ce moment-là, tous les enfants innus étaient classés inadaptés et le fait de les classer inadaptés, permettait à l’école d’avoir beaucoup de subventions pour l’école. Si moi je ne me sens pas bien là-dedans, pourquoi les Innus le seraient-ils? Il faut que eux aussi le sachent, qu’ils prennent part aux décisions, pas juste des personnes pour que l’école soit subventionnée. Le plus dur pour moi, à ce moment-là, c’était de réaliser que je ne savais absolument rien de ma culture, tout ce que je savais était de parler innu.
Musique - Kathia Rock


1 commentaire

Pierre Bastien il y a 8 ans, 5 mois

Je viens de revoir Évelyne que je n'avais pas vue depuis 1967, l'année de notre graduation.
Je suis tout ému de l'entendre.
Pierre


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